Editorial 19 (22 novembre 2022)
Annonce de notre AG fixée au 3 décembre,
en la salle Roland Wintzner du TAG. Invitation et programme,
Récapitulation des actions et des
événements (en ce 2e semestre 2022) :
a) Le samedi 2 juillet, l’association Heimetsproch un Tràdition a remis le Prix Charles Goldstein à Jean-Paul Sorg.
Pour son engagement au service de la culture régionale, ses travaux d’histoire
et de critique littéraire, en particulier ses traductions et commentaires de
plusieurs œuvres d’Albert Schweitzer. Dans son discours de remerciement, tenu
en grande partie en alsacien, le lauréat a exposé quelques réflexions sur la
nature et la situation de la langue régionale. E Sproch schnüft in sinra Literàtür. Ma lehrt sa in dam àss me sa
sprìcht un lìst un schribt un studiert / Une langue respire dans sa
littérature. On l’apprend en la parlant, en la lisant, en l’écrivant et en
l’étudiant. C’est là un principe pédagogique élémentaire, que des pratiques
d’immersion dialectale dans des classes d’école maternelle ne doivent pas
négliger par la suite. Emile Storck l’a dit avec éloquence dès 1957 dans son
poème Sproch, souvent invoqué et qui
nous sert ici d’emblème, mais on n’en a pas encore tiré toutes les conséquences
pédagogiques pratiques… Une langue se meurt (se décompose), si son peuple ne
puise pas des forces de régénération auprès de ses poètes… Justement !
b) Invitation à l’auberge du Bollenberg
le vendredi 8 juillet, le soir, par un groupe de touristes allemands intéressés
par la poésie et les traductions d’Emile Storck. Initiateur et
organisateur : Pr Wolfram Golla, qui habite sur la rive droite du Rhin à
Breisach-Niederrimsingen. Une vingtaine de convives bilingues, Herren und
Damen, des docteurs, professeurs et ingénieurs. Il est intéressant de savoir
que le nom d’Emile Storck et la poésie dialectale alsacienne ne leur étaient
pas inconnus ou qu’ils s’en montraient curieux. Ceux qui venaient de régions
non alémaniques d’Allemagne entendaient néanmoins et comprenaient, moyennant
quelques explications ponctuelles, des poèmes comme Medio in vita, Auroraveegele ou une traduction de Verlaine Es hilt drin in mim Harz. Je leur ai
parlé aussi des Deutsche Lieder eines
französischen Europäers d’Alfred Kastler, prix Nobel de physique 1966, né à
Guebwiller, dans la région du Bollenberg ! Ils découvraient. Une soirée
réconfortante.
b) L’exposition Jean Egen « au-delà
des tilleuls » à Colmar en septembre. Voir plus bas l’édito 17. Le jour de
l’inauguration, le 27 août, discours de Mme Evelyne Tibloux-Egensperger. Lire
la version intégrale ici dans rubrique Jean Egen, ainsi que l’article consacré
à l’événement, paru dans L’Ami-Hebdo,
le 25/9/2022.
c) Présence du Cercle à la Journée Forum des Associations organisée par la
municipalité de
Guebwiller le dimanche 4 septembre. Le stand était veillé par
nos deux secrétaires,
Daniel Haering et Claude Diringer, et par le président.
Nous avons annoncé la Promenade
littéraire dans le cadre de la Journée
européenne du patrimoine, le dimanche 18 septembre,
et pu prendre de nouveaux
contacts. Nous en avons déjà parlé et nous y reviendrons.
d) La veille, samedi, au réfectoire de
l’église des Dominicains, a été présenté
solennellement l’ouvrage, commandité
par la municipalité, Guebwiller, une
histoire
(Médiapop éditions). Un album soigneusement documenté et délicatement
illustré et mis en pages.
Le patrimoine littéraire de la ville ne manque pas
dans le récit de cette histoire.
De l’abbé Charles Braun à… Emile Storck. Deux
poèmes figurent en pleine page, avec la traduction. Kleine Stadt (Petite ville), p. 105, d’Ernst Stadler (1883-1914),
poète strasbourgeois-européen, un des fondateurs de la nouvelle poésie
allemande expressionniste avec son œuvre majeure, Der Aufbruch (janvier 1914). Il s’était rendu plusieurs fois à
Guebwiller et y avait découvert une « petite ville » à la fois
industrielle, ouvrière, et viticole. Son frère, Herbert, y fut Kreisdirektor
(sous-préfet) de 1913 à 1917.
Le deuxième poème de « paysage urbain »
retenu, p. 133, est Schnee am Owe
(Neige le soir) d’Emile Storck, extrait de Lieder
vu Sunne un Schatte. Es
schnèit. / In fine Fàde un Stràhne / kèit / der Schnee iw’rem schwarze Trottoir
àne. Ici
il nous faut bien signaler une malheureuse coquille dans la 2e strophe. Il ne
faut pas lire In Schnee, mais Im Schnee / sim Risle gsiht mer d’Latàrne /
steh… Et, quitte à paraître insupportablement pointilleux, nous regrettons
que l’intervalle entre les strophes n’ait pas été assez marqué. Autrement, tout
est parfait et intéressant, dans ce très beau livre !
Editorial 18 (12 septembre 2022)
Les journées européennes du patrimoine (les 17 et18 septembre) nous ont donné l’occasion de proposer une promenade littéraire guidée dans les rues de Guebwiller.
Sur les pas des auteurs qui sont nés dans cette ville et y ont vécu un certain temps, à une époque où l’Alsace changea plusieurs fois de nationalité par la force de l’histoire.
Départ dimanche le 18 septembre à 14h30, rue Abbé Braun. Auteur du remarquable ouvrage, paru en 1866, Les légendes du Florival ou La mythologie allemande dans une vallée d’Alsace. Voir ici rubrique Abbé Charles Braun. Ouvrage heureusement réimprimé en 2001, éditions Nolin, et ainsi disponible, avec une préface de Francis Gueth et une introduction et postface de Gérard Leser. Ce que l’on sait moins, c’est que cet abbé de Guebwiller fonda en 1848, pendant la période révolutionnaire, un journal Der Katholische Volksfreund, qui existe toujours sous le titre L’Ami-Hebdo où nous nous avons pu faire paraître récemment des articles sur Emile Storck, Alfred Kastler, Jean Egen. De la rue Abbé Braun, nous irons rue de la République, où nous nous arrêterons devant la maison natale de Jean Schlumberger (1877-1968), l’écrivain, fondateur à Paris de la nrf avec André Gide. Il a décrit sa jeunesse à Guebwiller jusqu’en 1892. Lire sa biographie Eveils, 1950, analysée ici sur le site.
A l’arrière de la Place St-léger, les maisons natales jumelées de Jean-Baptiste Weckerlin et de Pierre Bucher. De l’autre côté de l’église, l’Ecole Emile Storck. Pourquoi ce nom ? Cf. ici sous Eléments biographiques : « Dénomination Ecole Emile Storck », les explications d’un ancien instituteur de cette école, Maurice Emmencker. Dans le bas de la ville, maison natale de Marguerite Gable-Senné, rue de la gare ; celle d’Emile et de Joseph Storck, rue des Arquebusiers ; celle d’Alfred Kastler, attenante au presbytère du temple protestant.
Au Parc de la Neuenbourg, nous imaginerons le professeur Emile Storck, agrégé d’allemand, qui s’y promenait après ses cours à l’Ecole Normale des jeunes filles donnés dans les salles du… Château.
A 17h, conférence et lectures, avec traductions commentées de l’alsacien en français, par Jean-Paul Sorg, qui montrera ce que l’on peut reconnaître de « la Région de Guebwiller » (pour faire allusion à une parution récente) dans plusieurs poèmes et dans deux pièces dramatiques de l’écrivain Emile Storck, Der Goldig Wage (le lieu de la légende est le lac du Ballon) et Maidle wiss im Felsetal (l’action se passe dans une ferme auberge, dans le haut Florival).
Editorial 17 (23 août 2022)
On va vers la fin août, l’été décline. Un
nit wohr mer merkt scho um sich ume / e langsam un lislig Vergeh… (« L’on
sent déjà autour de soi / comme en sourdine un lent déclin… » traduction
Edgar Zeidler)
Soulagement presque. Car l’été fut
particulièrement violent cette année, enflammé et sec. Une succession de
canicules. Hundstag ! Der Pan hat
in de Sunneresser / e Gschirr vu Flamme iwergschnallt (« Pan a passé
un harnais / de flammes aux chevaux du soleil… » traduction Richard
Ledermann)
On sait : le dérèglement
climatique ! Tout le monde a constaté la chute dramatique de la population
des papillons. Les cinq poèmes qu’Emile Storck a écrits il y a 65 ans (Melodie uf der Panfleet, 1957) sur Cyaniris, Tagpfauiauig (Paon du jour), Trürmantel (Vulcains,), Auroraveegele 1 et 2, et ses chroniques
dans le Bulletin de la Société entomologique de Mulhouse, entre 1937 et 1947,
sont de l’histoire, sont du passé ! Ils nous rappellent ce qui a disparu.
De même « le ballet des libellules ».
On en surprend de moins en moins. Dàs Tànze vu de Libelle !
Trêve de mélancolie, fin août on prépare
la rentrée. 3 annonces.
1) Exposition Jean Egen à Colmar, Pôle
Media Culture Edmond Gerrer, 1 place de la Montagne Verte, du 27 août
(inauguration à 11h, voir le carton d’invitation) au 1er octobre.
Conférence discussion sur le film,
« Les Tilleuls de Lautenbach », par son réalisateur Bernard
Saint-Jacques et Lucas Bléger, comédien. Le samedi 6 septembre, 14h 30.
Conférence-lectures : Jean Egen,
l’homme tendre et l’homme révolté, par Jean-Paul Sorg et Martin Adamiec, le
mardi 6 septembre, 18h 30.
Toujours au PMC, auditorium. Entrée
libre. Voir ici documents sous Jean Egen.
2) Stand Emile Storck au Forum des
Associations, le dimanche 4 septembre, Centre sportif du Florival, de 10h à
17h30. Entrée libre. Voir flyer sous
2002. C’est une occasion de nous rencontrer et de découvrir nos productions
littéraires.
3) Dimanche 18 septembre. Journée Européenne
du Patrimoine.
A cette occasion le Cercle organise une Promenade littéraire à travers les rues de
Guebwiller. Départ à 14h 30, haut de la ville, place Bourcart, à l’angle de
la rue Abbé Braun. En marchant, nous passerons devant les maisons natales de
Jean Schlumberger, écrivain, de Jean-Baptiste Weckerlin et Pierre Bucher, de
Marguerite Gable, Emile Storck et Alfred Kastler. Présentation sur place des
auteurs.
Arrivée vers 16 h au château de la
Neuenbourg et son parc. Quand le Château abritait l’Ecole Normale de jeunes
filles, le professeur agrégé d’allemand Emile Storck, y enseigna, de 1951 à
1962. Dans la salle de l’auditorium, 16h 30, conférence de Jean-Paul Sorg et
lectures sur le thème : « La
région de Guebwiller » dans l’œuvre poétique d’Emile Storck.
En croisement, bien sûr, avec l’ouvrage La région de Guebwiller loin des clichés
réalisé par Mme Cécile Modanese, docteur en Histoire contemporaine, responsable
du Pôle culturel et touristique de la Neuenbourg et du service Pays d’art et
d’histoire de Guebwiller.
Au cours de cette promenade et avec la
conférence-causerie-lectures, nous verrons un peu ce que la littérature nous
dit de la ville, de son histoire et de son caractère.
(Des précisions sur le déroulement de la
journée vous seront encore communiquées une semaine avant par la presse et par
une lettre du Cercle à ses membres et sympathisants.)
Un + ici : Sous Mulhouse, âme et
esprit, découvrir encore un poète singulier, Paul Drumm (1976-1960).
Editorial 16 (22 mars 2022)
Mars : l’antique (éternel) dieu de
la guerre et le mois du printemps. A la guerre opposer la poésie et la parabole
de l’amandier. « Mon frère l’amandier, parle-moi de Dieu. – Et l’amandier
s’est couvert de fleurs » (Nikos Kazantzaki, Lettre au Greco).
Chez nous, dans le vignoble, à flanc de
coteau, les amandiers fleurissent à la mi-mars. Emile Storck est
encore sorti
de la ville tard le soir et il a vu « à l’orée du bois tressée de fils
d’or un petit arbre tout en rose
qui explosait de milliers de fleurs ». Un wun ich noch üse bin geschtert spoot, /
do isch am
goldiwerspannte / Waldrand e Bàimle im Roserot / vu toisig Bliemle
gstande
(Lieder vu Sunne un Schàtte,
März, et Par les fossés et les haies).
Ce petit arbre – das Baimle –
était l’amandier solitaire que l’on repérait de
loin sur une hauteur du vignoble de Guebwiller.
Il signalait en avance la venue
du printemps.
Rendez-vous samedi le 2 avril à 14h 30,
place de la mairie de Soultzmatt, au pied du vignoble (Zinnkoepfle). Découverte
du sentier des poètes. Entdeckung auf dem Dichterweg. Lecture des poèmes en
alsacien et en français. Animation musicale. Dégustation (Weinprobe) des vins
du Zinnkoepflé et de la vallée noble. Une manifestation soutenue par la commune
de Soultzmatt et Frieihjohr fer unseri Sproch.
Pièce jointe (affichette, Flugblatt)
sous 2022.
Découvrir aussi, sous Nathan Katz, les
souvenirs et une photo de Sylvie Reff qui avait rencontré le poète à Mulhouse
en 1970.
La création des fêtes Frieihjohr fer unseri Sproch veut depuis
20 ans stimuler le désir d’Alsace et un désir d’alsacien. Rheinblick, le supplément hebdomadaire des quotidiens L’Alsace et
DNA, titre aujourd’hui même : Regionalsprache :
Neue Lust wecken. Et en page intérieure, un entretien avec Nicolas Matt,
vice-président de la CEA chargé de la question du bilinguisme : Jugend als Motor für Zweisprachigkeit. En exergue : Bei
den Jugendlichen muss der Appetit auf das Erlernen dieser Sprache geweckt werden
und gleichzeitig bei den Älteren der Wunsch, sie weiterzugeben.
Vaste et noble programme! Les méthodes
et les moyens sont divers. Il faut s’entendre et s’unir. Pour notre part, ici,
nous proposons les voies du théâtre – se reporter à l’éditorial 15 – et de la
poésie. Lire sous 2022 « Présentation et étude comparative de deux
poèmes : Schnee de Nathan Katz et Schnee am Owe d’Emile Storck.
Multiplions les exemples
et les… actions.
Editorial 15 (7
mars 2022)
Crises et drames, avec les pires
menaces, ne nous lâchent pas. Une pandémie mondiale nous a frappés et bloqués
pendant deux ans. A peine semble-t-elle se résorber qu’une guerre épouvantable
se déclenche, dont nul ne peut imaginer le terme. La menace d’une destruction
nucléaire a été agitée. Fatalité de l’atome qui saute sur le chemin de
l’humanité. Le poète (Emile
Storck) l’avait dit (Dunkli
Wihnachte, Lieder vu Sunne un Schatte, 1962) :
‘S Atom springt iwrem Menschewag
Notre modeste chemin ici est de
continuer à pratiquer l’humanisme. Nous pouvons le faire localement en
cultivant nos « humanités régionales », en lisant et en faisant
connaître « nos » grands poètes dialectaux, qui ne sont pas moins
universels en profondeur que d’autres à audience nationale et même
supranationale. Nous apprenons dans leurs œuvres ce qu’est la nature humaine et
des aspects de la condition humaine par temps de bonheur et, plus souvent, de
malheurs.
Nous remercions les Amis de la Bibliothèque de Colmar de nous avoir donné la chance
d’une conférence sur « Emile Storck et Nathan Katz, deux tempéraments
poétiques », le samedi 12 mars,
16h, au Pôle Média Culture (PMC) Edmond Gerrer de Colmar.
Voir affiche et texte sous 2022.
Et un article « Idées pour un Conservatoire régional du
théâtre alsacien ». Pour concrétiser ces idées, nous avons pris des
contacts avec des responsables culturels et politiques de la CEA. Nous espérons
des suites…
Découvrez aussi sous 2022 le nouvel état
de notre Anthologie portative des poètes
du Florival. Toujours à compléter, en vue d’un sentier des poètes dans
notre ville et dans la vallée.
Sous Entomologie, un texte inédit en français : Un congrès lépidoptérologique au ciel. Etonnant,
désopilant sketch pour revue. Avis
aux troupes !
Œuvre épistolaire : présentation de
la correspondance entre Nathan Katz et Emile Storck et la correspondance avec
Mme Yvonne Gunkel, actrice.
Voilà les premières nouveautés de cette année. Bientôt
la tradition du Frieihjohr fer unsri
Sproch. Notez: promenade sur le sentier des poètes de Soultzmatt, le 2
avril, 14h30. Une invitation détaillée vous sera envoyée, par un nouveau
courriel et le site.
Editorial 21 (30 juin 2023)
Presque 40 jours sans pluie, comme dans
le désert de la Bible. De mi-mai au 18 juin. Ciel immuablement bleu. Juste,
parfois, quelques maigres nuages très haut, dont on voit qu’ils sont stériles.
Les heures, les jours se suivent et se ressemblent. Ensoleillement
« andalou ». La terre du jardin sèche et dure, impossible à
travailler. La météo répète chaque jour : « Beau temps ». Une
notion tout à fait partiale, à destination des touristes et des promeneurs. Pas
des jardiniers et des agriculteurs !
Poésie
et météorologie
L’originalité poétique d’Emile Storck,
lorsqu’il décrit les choses, les phénomènes (de la nature), est de les montrer
dans un moment particulier du temps qu’il fait, dans une atmosphère, donc une
lumière, qui change. En lisant des poètes comme lui et d’autres de sa
génération, comme Nathan Katz notamment ou Raymond Buchert, nous mesurons mieux
par contraste les inquiétants bouleversements climatiques qui sont enclenchés depuis
une quinzaine d’années et causent déjà d’énormes problèmes. « De Pékin à
Berlin, le mois de juin a été bien trop chaud » (Libération). « On a enregistré en Alsace le plus chaud mois de
juin » (L’Alsace).
Années 1950, on connaissait des mois de
juin humides (normaux !). Dans Nasser
Juni / Juin humide, en quatre strophes de cinq vers (rimes disposées a b a
a b), comprenant cinq phrases (dont la 2e s’étend sur 8 vers), le
poète (du Florival) rapporte – raconte - quelques phénomènes que nous ne
retrouvons plus au présent : derniers appels lointains d’un coucou qui s’est
retiré dans les bois, frondaisons mouillées, bourrasques de fleurs d’acacia qui
recouvrent les cours d’eau comme d’un Lieweherrgottsteppich
(dais ou tapis de bon Dieu), nuages de parfum des chèvrefeuilles répandus sur
les haies, lourd nuage noir à l’horizon au-dessus de la montagne. On attend
l’orage.
Version intégrale du poème, extrait de Melodie uf der Panfleet, et de sa fluide
traduction, par le poète Albert Strickler, dans Par les fossés et les haies et ici sur le site (Œuvre poétique et
traductions). Pour mise en appétit, voici la dernière strophe :
Un ‘s Buschwàrk fangt a flamme un a
zinde,
e Sunnestrahl
geht durch der Wald im Putz.
Scho dunkelt’s
wider in de Bàrge hinte,
e schwàri Wulk
kummt schnàll mit grauie Binde,
un in de Blätter
rüscht der Ràgeschutz.
Les massifs de buissons s’embrasent et
brillent encore,
quand un rayon de soleil passe à travers
la forêt lavée.
Mais déjà l’obscurité revient de
derrière les montagnes,
un lourd nuage bordé de gris avance
rapidement
et une ondée s’abat qui fait bruisser le
feuillage.
Document
biographique
Dans la perspective toujours ouverte
d’un ouvrage de biographie croisée sur les deux frères, Joseph et Emile, nous
ajoutons l’analyse d’un document qui se rapporte à une phase de leurs études
universitaires. Pour sans doute préparer une épreuve de psychopédagogie, qui
faisait partie des épreuves de l’agrégation, ils ont « potassé » le Précis de psychologie du philosophe
américain William James (1842-1910), fondateur du « Pragmatisme » et
reconnu alors aussi comme le fondateur d’une psychologie scientifique.
Le Dr. Daniel Storck, fils de Joseph et
neveu d’Emile, a trouvé dans la bibliothèque familiale les deux exemplaires
dont les deux candidats se sont servis. A partir de leurs annotations en marge,
il a tenté de comparer la personnalité de l’un et de l’autre. A lire sous
« Les deux frères (éléments biographiques) ».
Carl Spitteler, poète lyrique
Nous connaissions l’existence de cet
ouvrage d’Emile Storck, un travail universitaire consacré à l’œuvre poétique de
l’écrivain suisse Carl Spitteler, mais nous ne l’avions pas sous la main. Un
exemplaire de 130 pages, tapées à la machine, a été retrouvé dans les archives
du Cercle. Daniel Haering, secrétaire de notre association et historien
passionné, a scanné les pages et les a préparées, au format 27,7 x 19,5, pour
l’imprimeur (la librairie Richard de Guebwiller). 10 exemplaires ont été
imprimés. Prix de revient d’un exemplaire : 15€. Il en reste quatre. Les
notes en bas de page ont été écrites par l’auteur à la main d’une écriture très
fine. C’est un ouvrage qui a un intérêt historique en soi (un des rares
consacrés en français à cet écrivain suisse) et un intérêt pour la connaissance
de la poésie même d’Emile Storck.
Carl Spitteler : 1845 – 1924. Né à
Liestal (canton Bâle-Campagne, voisin du Sundgau). Décédé à Lucerne. Prix Nobel
de littérature 1919. Un poète lyrique, épique et dramatique, un romancier (Imago, 1906) et conteur (Hund und Katze), et un essayiste
(feuilletoniste dans plusieurs journaux, dont surtout Kunstwart et la Neue Zürcher
Zeitung). Poète exigeant et secret, travaillant les mythes, Prometheus und Epimetheus (1881), il est
apparu sur la scène européenne et a fait parler de lui en décembre 1914 en
publiant Unser Schweizer Standpunkt (« Notre
point de vue suisse »), qui appelait à la fois à l’unité intérieure de son
pays entre Romands et Alamans et à sa neutralité durant la guerre : Ni
République française ni Empire allemand. « Au principe des nationalités,
il oppose celui d’Etats librement unis et harmonisant leurs
civilisations ». L’idéal européen jusqu’à nos jours !
Romain Rolland le salue comme un grand
humaniste qui a le courage du pacifisme, il le cite 31 fois dans son Journal de guerre 1914-1919 et il
appuiera sa candidature pour le prix Nobel.
Mais ce n’est pas à ces considérations
politiques que peut s’arrêter Emile Storck dans un travail universitaire. Il
s’est concentré sur son sujet : l’art lyrique. Chose troublante pour le
lecteur d’aujourd’hui qui connaît le parcours de sa vie et son œuvre littéraire
propre. Ses analyses fouillées de l’écriture de Spitteler, ses considérations
sur son « lyrisme visuel », qui doit gagner en précision, et ses
réflexions théoriques sur la condition et la mission du poète paraissent
s’appliquer en partie à sa propre œuvre, lyrique et dramatique, et la
caractériser. Alors qu’à ce moment, années trente, il avait résolu de renoncer à
tout travail littéraire personnel, c’est comme s’il anticipait sur sa créativité
future, qu’il déploiera à son retour en Alsace, années cinquante et soixante.
Une similitude frappante, qu’il faudrait avoir les moyens d’examiner de
près : Spitteler, auteur d’un recueil, Schmetterlinge,
Gedichte (1921), et Storck apparaissent l’un et l’autre comme de
remarquables observateurs et poètes des papillons.
L’instituteur et étudiant en lettres
Emile Storck a présenté son travail sur Carl Spitteler pour un Diplôme d’études
supérieures de langues et littératures étrangères vivantes le 23 janvier 1931,
à l’université de Strasbourg. Il obtient la mention assez-bien ! Professeur
certifié, exerçant à l’école primaire supérieure de Mulhouse, il réussira les
épreuves de l’agrégation, dans l’ordre des langues vivantes – allemand, en
juillet 1935 et fera alors carrière dans l’enseignement secondaire, au lycée de
Lons-le-Saunier de 1936 à 1946, ensuite au lycée de Digne jusqu’à sa nomination
à l’Ecole Normale de jeunes filles de Guebwiller en 1951.
Carl Spitteler est un écrivain bien
oublié aujourd’hui, même en Suisse, et complètement méconnu. L’occasion de le
découvrir à travers le mémoire que lui a consacré Emile Storck est d’autant
plus précieuse et a du sens. La vie ménage des surprises et des révisions. Il y
a quelques semaines, à un café philo, dans le Sundgau, où il était question
d’Albert Schweitzer, prix Nobel de la paix, un monsieur est intervenu, Dr.
Mosser, qui a jeté dans les débats l’exemple de Carl Spitteler, poète et
penseur dont l’éthique apparaît de la même tenue que celle de Schweitzer.
Respect de la vie et des libertés. C’est cela, ce hasard d’une rencontre, qui
m’a fait souvenir du texte d’Emile Storck et m’a incité à le rendre accessible.
Martine Blanché, vice-présidente de
notre Cercle, auteur d’une thèse sur l’œuvre dramatique d’Emile Storck,
soutenue en 1997, imprimée en 2019 (éditions Jérôme Do Bentzinger, Colmar),
prépare une recension de cet ouvrage jusque-là inédit, pour publication dans la
RAL (Revue Alsacienne de Littérature)
et sur… notre site.
Annonces
1. Samedi 16 septembre.
Journée européenne du patrimoine. Pour un hommage à l’historien du patrimoine
et artiste Charles Wetterwald (1871-1972), qu’Emile Storck connaissait bien, le
Cercle donne rendez-vous à 15h 30 devant le Graethof, 7 rue des Remparts, centre
ville Guebwiller, derrière les cinémas. De là promenade historique guidée à
travers la ville jusqu’au Musée du Florival (aujourd’hui Théodore Deck), dont
Ch. Wetterwald a été le fondateur en 1933. Causerie et présentation de
documents. Détails sur le programme des deux journées et dans la presse.
2. Jeudi 9
novembre. 50e anniversaire de la mort d’Emile Storck. Présentation
et lectures d’un choix de ses œuvres par des acteurs (et actrices) du Théâtre
Alsacien de Guebwiller à l’amphithéâtre du Château de la Neuenbourg. L’horaire
et les conditions seront indiqués ici et dans la presse ultérieurement, ainsi
que sur le site du Théâtre : www.tag-etg.com
Le dimanche 3
septembre, au forum des associations de Guebwiller, le TAG tiendra un stand
(10h – 18h). Des ouvrages d’Emile Storck et de Nathan Katz y seront exposés.
Editorial 20 (7 février 2023)
Le compte-rendu de notre assemblée
générale ordinaire du samedi 3 décembre 2022 a été adressé encore l’an dernier
aux membres du Cercle. Le voici archivé sous 2022.
Le point essentiel est d’assurer,
par-delà ce qui pourra arriver au Cercle, la pérennité de l’œuvre d’Emile
Storck, dont nous avons ici peu à peu découvert l’extraordinaire richesse et
son importance dans une histoire de la littérature alsacienne. Les institutions
des associations et les associations elles-mêmes sont éphémères. Le temps de l’œuvre
spirituelle accomplie les dépasse. De sorte que nous la disons « éternelle »,
ou transcendante, hors de nos comptages. Anestelle müesch’s im
Sunnekleid, wie wenn dü ‘s schaffe wottsch fir d’Ewigkeit. Cf. Prolog, Lieder vu Sunne un Schàtte, An e junge
Dichter.
L’impératif est donc que soient mises en
sûreté les archives nombreuses, recueillies par le Dr Daniel Storck, neveu de l’écrivain.
C’est un grand travail qui devra être idéalement réalisé dans les mois qui viennent.
Lire en particulier dans le compte rendu « Constitution et dépôt des
archives ».
Le président avait dit dans l’introduction
à l’assemblée générale que ces deux dernières années aucun décès ne fut à déplorer
parmi les membres du Cercle. Mais voici que ce 23 janvier est décédée Mme Eve
Gissinger, à l’âge de 92 ans. Nous la gardons dans notre mémoire. Une figure de
la vie associative et culturelle de Guebwiller. Professeur d’allemand au Lycée
Alfred Kastler. Elle a fait partie des membres fondateurs du Cercle en 2000. Elle
en fut, en sa qualité de germaniste, une conseillère précieuse. Elle
connaissait à fond l’histoire de la littérature alsacienne et l’histoire de sa
région. Toujours lucide. Toujours sceptique, parfois railleuse. Elle répétait :
Mir rüedra gega d’r Strom. Nous
ramons contre le courant. Cela ne l’empêcha pas de rester active, militante,
aussi longtemps que ses forces le permettaient. Nous regrettons de ne pas avoir
recueilli les souvenirs qu’elle pouvait avoir d’Emile et aussi de Joseph
Storck.
Les témoins se font rares et ne parlent
pas spontanément. Restent les archives, qui renferment de l’inédit. Voici deux
surprises à… ouvrir. Deux traductions : l’une d’un poème de Baudelaire, « Le
guignon », l’autre d’un poème de Verlaine, « En sourdine ». A
découvrir sous Œuvre poétique et
traductions.
En attendant plus… Même si elle n’est
pas très abondante, la correspondance d’Emile Storck avec des amis, des
collègues écrivains, des éditeurs, des journalistes, des historiens, est du
plus grand intérêt pour la connaissance de la vie littéraire des années 1950 à
1970. Un grand chantier va s’ouvrir avec les archives. Des ouvriers viendront.